jeudi, octobre 20, 2005

La Magie (1)

Il m'est arrivé récemment une anedote troublante, qui n'est pas sans me rappeler bien d'autres du même type, vécues auparavant. Ce qu'elles ouvrent comme possibilités est plutôt fascinant. Nul doute que les deux que je vais vous raconter trouveront écho dans vos propres souvenirs. La première date d'à peine quelques jours..

*
* *
Je suis au restaurant. J'ai fini de manger. En prenant un café, je fais les mots croisés du journal. Je les termine. Enlève mes lunettes, les range. Le journal, plié en deux sur la table montre la rubrique nécrologique. Il y a une asssez grande photo. De toute façon floue. Pour moi.

Je ne lis jamais la rubrique nécrologique.

Pourquoi est-ce que je reprends mes lunettes? (Je pars...) Pourquoi je regarde cette photo d'un homme que je ne connais pas? Pourquoi je regarde son nom? Un nom très courant ici. Pourquoi je pousse jusqu'à vérifier son prénom? "Samuel… Samuel B."

Et j'allume. Il y a 10 jours j'ai parlé au téléphone à un Samuel B., suite à une annonce pour louer un garage. Mais depuis quelques jours il ne répond plus à mes courriels. Je connais quelqu'un qui connaît son visage. Qui vérifie et me confirme. (Ça va créer d'ailleurs une certaine commotion.)C'est bien lui.

Je répète. Quel est le phénomène qui m'a fait lire en détail quelque chose que je n'ai même jamais regardé de toute ma vie…?


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* *
Il y a vingt ans, après plusieurs années de voyage, par hasard, je suis devenu pigiste pour Radio-Canada à Paris. Pour la radio d'abord. Au bureau, il y avait un monteur télé, grand et assez distant, que je croisais parfois mais avec lequel je n'avais aucun rapport, professionnel ou autre. Je devais apprendre plus tard, que ce descendant de basques et d'écossais, installé à Paris depuis à peine une dizaine d'années, s'était retrouvé un peu par hasard lui aussi, monteur pigiste régulier pour la "télé canadienne".

Tout aussi par hasard, quelques semaines plus tard, nous nous retrouvons au comptoir d'un bistrot pas loin du bureau. Nous prenons une bière, faisons rapidement connaissance. Je lui glisse:

- "On m'a dit, tu vis en banlieue toi, non?"
- "Oui."
- "Où ça?"
- "Oh! Dans le nord près de St-Germain-en-Laye.."
- "Où exactement?"
- "Ça ne te dira rien c,est un petit village de rien du tout…"


Pourquoi à ce moment-là vais-je insister? Je suis d'un naturel curieux mais quand même….

- " Oui mais où?"
- " À Triel sur Seine…"
- "Ah ben ça alors….."


Vingt-deux ans auparavant, mon père est venu vivre en France quatre mois, dans le cadre d'une étude universitaire. Et toute la famille a suivi. Le premier mois, mes parents avaient échangé notre maison de l'Ile d'Orléans avec celle d'un couple français. Maison qui bien sûr, était à… Triel sur Seine!

Je raconte la chose au monteur, Olivier. Qui, la trouvant quand même bien bonne, du coup m'invite chez lui une de ces prochaines fin de de semaine.

Avant de continuer deux choses. Ceux qui me voient déjà venir, attendez, C 'est loin d'être terminé. Et pour la compréhension des choses, Olivier, sa femme, leur fille,(et leur invraisemblable ménagerie) sont devenus au cours des années qui ont suivi mes meilleurs amis. Une seconde famille. De ce premier week-end, je suis pratiquement retourné chez eux chaque fin de semaine. Pendant quatre ans.

Donc un mois plus tard, Olivier vient me chercher à la station RER de St-Germain. Direction Triel. En 22 ans, les choses ont bien changé. Mais dans le village même, nous prenons une route qui passe sous la nef de l'Église.

- "Ahhhh! Ça ça me rappelle quelque chose."

La route serpente vers le haut, au dessus de la Seine. Je m'excite un peu.

- "Oui. C'était par là… Et en bas il y avait un restaurant qui s'appelait le Coq au Vin.!"

Olivier rigole. Le restaurant existe toujours…

Et nous arrivons chez lui. Ce n'est pas "LA" maison...


Mais celle juste à côté….


Et ce n'est pas la fin de l'histoire non plus….

Deux ans plus tard, ma mère et ma sœur viennent en voyage à Paris.

Évidemment elles sont invitées chez Olivier, chez qui maintenant j'ai mes aises depuis longtemps. Toute la bande habituelle est réunie pour acceuillir ma famile. Nous sommes bien quatorze à table et je ne compte pas les chats et les chiens… C'est le festin...

Et là, au beau milieu d'une cacophonie de rires et de verres qui trinquent, ma mère, mine de rien, sort une petite photo noir et blanc. Jaunie par le temps.

Sur cette photo qui date de 22 ans, à côté d'une vieille Simca 1000, ma mère, ma sœur et moi posons . J'ai sept ans sur la photo. Nous sommes dans une rue en pente.

Et derrière nous, couverte de lierres… La maison d'Olivier.

Exactement celle où tout à coup, plus personne ne parle autour de la table.

Estomaqués que nous sommes de cette invraisemblable boucle du temps….

*
* *
(Ce que j'ai intitulé plus haut "La Magie" et que vous venez de lire, je ne l'ai pas intitulé (1) pour rien... J,ai quelques petites idées sur le "hasard". Mais en attendant de continuer, j'ai bien envie de voir si vous avez quelques réactions...)

6 Commentaires:

Anonymous Anonyme a répondu...

Parfois on appelle ça "synchronicité", mais je préfère "coïncidence poétique". N'est-ce pas une belle expression?

6:44 a.m.  
Anonymous Anonyme a répondu...

J'adore ce genre de récit. Sans savoir pourquoi, ça me donne un grand frisson qui justifie l'utilisation du terme "magie". Ça vaut 100 fois n'importe quel David Copperfield!

9:48 a.m.  
Blogger Lumières a répondu...

C'est la beauté de la vie, hein!
J'en prendrais encore quelques-unes, Bertrand.

9:13 a.m.  
Anonymous Anonyme a répondu...

superbe suite de coincidences!

ces trucs-là, ça me chavire, me réjouit et m'incite à regarder très loin devant, là où l'on ne voit plus rien, là où tout semble disparaître...

est-ce possible que nous arpentions différentes réalités en même temps?

6:35 p.m.  
Anonymous Anonyme a répondu...

Magie, nous disons toujours en oubliant que tout est lié, qu'il y a des continiuités invisibles et qu'il suffit de toucher le bon fil...
on appele ça à tort l'irrationnel mais quand un chat retrouve son domicile à 1000 km, on appelle ça un chat...
Il y a des champs de conscience qui sont là, y avoir accès n'est pas un question de volonté, c'est justement quand on lache son biaisant cortex et qu'on laise d'autres choses nous toucher.
Se laisser toucher par soi-même étant le travail de toute une vie, les heureux évènements qui vous mettent sur la voix qu'on nomme intuition sont ancrés plus profondément qu'on n'ose l'imaginer... juste de la conscience qui vient et qui nous indique notre dimension insoupçonnée...

6:26 a.m.  
Blogger Oncle Dan a répondu...

Au sujet de la rubrique nécrologique ... je pense que c'est le doigt de Dieu ...

http://www.netdisaster.com/go.php?mode=god&lang=fr&url=http://salicorne.blogspot.com/

6:27 a.m.  

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Encore moins appréhender le futur."
B.H.

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